Extrait
Les Lunes de Terra / 1. La trahison d'un père

CHAPITRE 1

Terra est un monde à part, aux contrées singulières, paysages singuliers et habitants remarquables : une beauté aux multiples facettes. Mais elle est aussi et avant tout la Terre aux Cinq Lunes. Aux reflets de la Nature, drapée d’or ou de pourpre, aux couleurs chatoyantes de l’eau ou de la nuit, chaque Lune est unique. Et chacune résonne avec un continent, un peuple ; ces derniers puisant leur énergie pour vivre dans les rayons lunaires de celles appelées Lune d’Émeraude, caressant de sa lumière verte le puissant peuple des Ours ; Lune d’Éther, fierté rouge du peuple des Aigles ; Lune d’Aigue-Marine, aux reflets aussi clairs que l’eau turquoise des Sauriens ; Lune des Sables, à la lumière d’un jaune aussi profond que la carapace des Scorpions dans le désert ; et Lune de Nuit, rayonnant pour le peuple Loup, aussi sombre et damnée que les ténèbres les plus noires qui entourent cette lie.
L’équilibre entre tous est fragile, mais existe. Il perdurerait si l’harmonie régnait, si un évènement des plus sinistres ne revenait pas, cyclique, mettre l’existence même de Terra en danger.



CHAPITRE 2

Le Siège

L’homme terrifié ne comprenait pas. Il courait à perdre haleine, veillant à faire le moins de bruit possible sur les pavés de ces couloirs souterrains. L’individu était décharné, aux membres tordus. Maintenant, la souffrance résonnait dans tout son corps. Mais il vivait. Il dépassa l’avant-dernière porte, évita les derniers geôliers dans ce dédale de couloirs et retint sa respiration. Il glissa un œil vers la salle des gardes qui se trouvait devant lui. Elle était vide. Il retint un cri de victoire et s’y précipita. Il la traversa en flèche et monta les escaliers quatre à quatre, silencieusement, claudiquant sur ses chevilles aux angles anormalement pointus. Il arriva à une porte en bois, épaisse et solide.
L’homme attendit un bref instant, résistant à la tentation de l’ouvrir tout de suite, guettant chaque bruit, chaque craquement qui arrivait jusqu’à lui. À peine une minute plus tard, il conclut que tout était normal. Mais il fallait qu’il fasse vite. Il prit une profonde respiration. D’une main tremblante, le fugitif posa la main sur la poignée en fer forgé. Il appuya doucement et poussa l’épais panneau de bois de ses doigts aux phalanges déformées.
Une chance pareille ne se représenterait jamais. Il devait la saisir à tout prix. Il n’avait plus de larmes pour pleurer, plus de voix pour crier, seulement du sang à offrir, celui qui coulait encore un peu dans les veines de ce corps famélique.
L’homme poussa un peu plus la porte, toujours prudemment. Et fut aussitôt ébloui par une lumière trop vive, crue. Elle lui fit mal aux yeux, brûlant sa rétine. Il y avait si longtemps qu’il ne l’avait pas vue. Qu’importe ! Il plongerait sous sa douce morsure, il sentirait les rayons du soleil caresser sa peau pâle, striée de cicatrices. Il attendit encore quelques instants, aux aguets, prêtant toujours une oreille attentive aux bruits dans ce couloir pourtant désert. Tremblant d’une excitation retenue mêlée d’une peur viscérale, il sortit, voûté, à quatre pattes, comme un animal.
Il regarda tout autour de lui, perdu. Tous ses repères basculaient, perdaient leurs sens. Il était totalement désorienté et ne put s’empêcher de divaguer une seconde, enivré par le parfum de la liberté. La situation était critique, sa liberté encore plus : il voulait en profiter pour chaque instant qu’il passerait dehors.

[Extrait coupé pour raison technique]